Conférence : La société civile et le développement local en Tunisie

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La ville de Lyon s’investit en matière de solidarité internationale, selon Max Vincent, en poste à la coopération décentralisée de la Métropole. Elle a su accompagner le sursaut démocratique vécu par les Tunisiens, notamment en mettant en place des réseaux de coopération entre les cités Lyonnaises et les communes Tunisiennes. En ce dimanche 15 novembre, les enjeux de la transition politique tunisienne, le développement régional et « l’exception Tunisienne » seront au cœur des débats.

Le regard d’une historienne est essentiel pour comprendre les évènements contemporains ayant bouleversé le Tunisie. Dans les années 20, l’essor d’un espace public en Tunisie, autour de clubs puis de cercles de réflexions politiques contestant le protectorat, a permis la création du premier parti politique Tunisien. En cristallisant les revendications constitutionnalistes, il matérialise l’effervescence politique et constitue un particularisme propre à la Tunisie. Au-delà du politique, la création d’associations sportives, culturelles, littéraires, puis féministes, témoignent du dynamisme de la société civile. L’appropriation des cadres d’actions politiques, la naissance de syndicats et de mouvements politiques secrets, ont accompagné la déclaration d’indépendance Tunisienne. Aujourd’hui, la Tunisie a su capter, s’approprier, et parfois instrumentaliser les richesses et les initiatives du monde. La féminisation de la vie active, associative et politique en Tunisie témoigne de cette particularité.

Le Consul général de Tunisie à Lyon, Adel Ben Lagha, revient sur les évènements de 2011 et leurs conséquences. La société civile Tunisienne, longtemps étouffée par le pouvoir de Ben Ali, a vu ses ambitions et ses revendications jaillir de la révolution. L’essor de l’espace public, la privatisation des libertés, la multiplication des associations – 18 000 inscrites – dessinent les contours d’une société civile active et militante. Chapeautée par une Haute Instance, la transition politique et démocratique, est désormais achevée avec la proclamation de la constitution. Désormais, la phase de la transition économique s’amorce. Le développement économique intègre de nouveaux enjeux de coopérations et de solidarité entre les Tunisiens.

Selon Hafidha Khadraoui, que nous avons déjà présenté précédemment, évoque un bémol à l’essor de la société civile en Tunisie : certes, les associations se sont multipliées, mais bien souvent, elles se sont cantonnées aux villes et ont délaissé la vie rurale. Diriger le monde politique vers la décentralisation, c’est l’un des objectifs qui doit accompagner la transition démocratique en Tunisie. L’action de Hafidha Khadraoui nous montre comment une association locale, aux moyens limités, peut participer à l’élan national. Dans une démarche participative, le captage de l’eau de pluie ou encore la valorisation des ressources forestières ont permis d’améliorer les conditions de vies des habitants ruraux.

Le cadeau le plus précieux de la révolution est certainement l’expression libre des opinions au sein de la société civile, selon Nicolas Wit, directeur-adjoint de Cites Unies France. Au côté d’autres associations, il s’agit de démontrer que, plus qu’une simple relation de bons voisinages, la France et la Tunisie doivent oeuvrer ensemble et associer leurs sociétés civiles. L’objectif est de faciliter le parcours de la Tunisie dans l’exercice démocratique, alors que des élections municipales s’annoncent.

Le Prix Nobel de la Paix, est venu saluer la coalition politique et associative Tunisienne, qui a permis d’éviter une guerre civile lors de la transition politique. L’engagement de la société civile Tunisienne, fut d’autant plus essentielle que la révolution a été portée moins par un leader charismatique ou un parti politique, que par des revendications politiques naturelles. Et le Quartet a su tirer profit des sit-ins organisé dans la rue, face à l’assemblée nationale. Le monde intellectuel, et notamment les avocats, déjà actifs lors des revendications indépendantistes, ont aussi promu le désir de libertés fondamentales du peuple tunisien.

Désormais, la nouvelle étape de construction tunisienne est amorcée. L’occasion pour les associations solidaires d’associer le développement économique en germe, aux valeurs de développement durable et d’économie circulaire.

Mathis Buis

Globalisation néo-libérale, démocratie et résistances

Le cas du Grand Marché Transatlantique

Avant-propos

« Après l’effondrement du totalitarisme étatique en URSS, un nouveau totalitarisme émergeait : celui des marchés. Contrairement à la comptine journalistique, il ne découle pas d’une évolution inéluctable, mais de choix politiques délibérés effectués par tous les gouvernements occidentaux ». Cette fronde provocante, menée par les chercheurs Raoul Marc Jennar et Laurence Kalafatidès contre la canonnière libérale, est tirée de l’ouvrage « AGCS. Quand les Etats Abdiquent Face Aux Multinationales » parues aux Éditions Raisons d’Agir, fondée par Pierre Bourdieu. En exposant le risque totalitaire d’une globalisation synonyme de dérégulation des marchés, les deux auteurs condamnent l’Accord Général sur le Commerce et les Services qui tend à libéraliser le secteur des services publics :  de la santé à l’éducation en passant par l’accès à l’eau potable. En 2004, une mobilisation globale freinait les tractations secrètes pour la mise en œuvre de cet accord. Dix ans plus tard, le Grand Marché Transatlantique (GMT) entend aller encore plus loin dans l’extension du néo-libéralisme sur le continent européen, et rencontre, une nouvelle fois, des résistances sans précédent. L’histoire se répète.

Introduction

Le traité transatlantique est l’expression même du néo-libéralisme. Pour s’en convaincre et pour apprécier les conséquences d’un tel ancrage idéologique, il convient de revenir sur les motivations sous-jacentes du Grand Marché Transatlantique.

TAFTA : genèse d’une victoire annoncée de la globalisation néo-libérale

De puissants soutiens

Récemment, Philippe de Villiers a été invité sur tous les plateaux-télé pour la promotion de son dernier ouvrage. Nonobstant les opinions politiques, il est intéressant de revenir sur son témoignage. Il y affirme à TV Libertés, avoir assisté à une réunion de la Commission Trilatérale, en 2007, présidée par l’influent Brzezinski au sein des locaux du Parlement européen. Les propos tenus devant plus de 400 personnalités du monde politique et industriel évoquaient notamment la « destruction de l’homogénéité des nations » et l’objectif d’un « traité transatlantique » servant de pont à l’édification d’un « marché planétaire de masse ». Au côté de ce puissant club de discussion, le forum Trans-Atlantic Business Council s’évertue à aménuiser l’interférence des pouvoirs publics dans les relations commerciales transcontinentales. Il assure la promotion depuis de nombreuses années d’un tel accord, entérinant la perspective d’un marché échappant aux contraintes législatives et démocratiques nationales.

Le leitmotiv géopolitique du Grand Marché Transatlantique

La donne géopolitique ne doit pas être sous-estimée, car, couplé au partenariat transpacifique, le traité transatlantique s’inscrit évidemment dans une stratégie américaine de contrôle global des marchés afin de contrer la rapprochement croissant des puissances Eurasiennes. Accord Général sur le Commerce et les Services, Trade In Service Agreement, Accord multilatéral sur l’investissement… sont autant de façon de renforcer la puissance économique américaine en misant sur l’isolement des puissances concurrentes. La somme de ces traité joue le rôle de faire valoir des règlementations occidentales auprès des acteurs de la mondialisation, et plus particulièrement de la Chine. A travers notamment l’Organisation Mondiale du Commerce, l’objectif de cette homogénéisation des normes est de constituer un groupe de pression incroyablement puissant, regroupant plus de la moitié des richesses du monde, et capable de maintenir l’hégémonie américaine dans la régulation du système international. Cette motivation devient de plus en plus urgente, au fur et à mesure que des institutions concurrentes – la Banque d’Investissement Asiatique – et que des accords bilatéraux contestent la superpuissance américaine.

Le leitmotiv économique du Grand Marché Transatlantique

Le traité transatlantique se différencie de ses prédécesseurs pour qui l’ennemi principal était les barrières douanières. Considérées par le représentant américain au commerce comme « déjà assez basses », les contraintes aux frontières ne constituent plus l’enjeu principal des négociations. Désormais, dans une logique d’approfondissement du néo-libéralisme, il s’agit d’assurer « l’élimination, la réduction ou la prévention des politiques nationales superflues » (idem). L’interprétation de ces « politiques nationales superflues » est si large qu’elle peut à la fois décourager toute volonté de régulation de la finance, mais aussi désarmer l’ensemble des protections sociales, les mesures de protection de l’environnement, ou encore tout projet visant à accroitre le rôle du citoyen et son contrôle démocratique sur la politique. La menace que fait peser l’ambition de la logique néo-libérale sur la démocratie est parfaitement résumée par les confidences de David Rockefeller au magazine américain Newsweek : « Quelque chose doit remplacer les gouvernements, et le pouvoir privé me semble l’entité adéquate pour le faire »

Néolibéralisme et dé-démocratisation

La logique néo-libérale n’est ni plus ni moins que l’extension des logiques marchandes capitalistes à toutes les dimensions de la vie humaine. Comme en témoigne les politiques d’austérités imposées au besoin par l’étranglement monétaire et la négation de choix démocratiques, le cœur du néo-libéralisme entend substituer le raisonnement d’un gestionnaire et les préoccupations économiques à toutes considérations se référant à l’humain, à la justice, au sacré, et évidemment aux pratiques démocratiques. La raison néo-libérale formate progressivement un homo œconomicus intégré dans une société anti-politique, sacrifiant la figure d’un citoyen réduit à l’état de capital humain, promouvant la financiarisation de l’indispensable et l’édiction de l’impuissance publique car démantelée et gouvernée par l’endettement et obnubilé l’objectif d’une sainte croissance économique. Pour bien comprendre les enjeux de l’enterrement brutale du rêve démocratique par le néo-libéralisme, l’analyse de Wendy Brown est indispensable, notamment lorsqu’elle met en avant la glissement sournois de l’essor du libéralisme vers l’enfermement aux logiques néo-libérales  : « de façon tout à fait perverse, le sujet jadis séduit par la promesse d’émancipation radicale de la raison néolibérale en est désormais réduit à voir son destin et son orientation morale liés organiquement à un projet macro-économique et à faire le sacrifice de son existence au nom de ce projet ». Désormais, le citoyen « peut être sacrifié, privé d’emploi ou réduit à la famine dès qu’il cesse de contribuer au projet de la nation-entreprise, ou bien lorsque ce projet ne peut tout simplement plus lui garantir le bénéfice d’une assurance maladie, d’une retraite, d’une éducation, ni une quantité minimale d’air pur, d’eau potable ou d’espaces verts, remettant ainsi en question son existence même » (idem).

Embourbé dans ce projet de gouvernance néo-libérale et d’économisation de la politique, le traité transatlantique annonce les nouveaux contours de la globalisation. Cependant, l’opposition croissante de collectivités, d’associations, et de citoyens préfigure aussi une contestation globale des négociations secrètes menées par la commission européenne.

Contestation, actions et résistances : les Européens se lèvent contre le GMT

Alors même que le Parlement Européen s’est récemment accordé pour soutenir le projet transatlantique, les mobilisations en Europe prennent une ampleur historique.

Une mobilisation historique

Le samedi 10 octobre 2015, l’opposition au traité transatlantique faisait vibrer toute l’Allemagne en réunissant la plus grande manifestation à Berlin – entre 150 000 et 200 000  manifestants – depuis les mobilisations pacifiques contre la guerre en Irak. Le lendemain, ce sont pas moins de 1100 marches, réunions, sensibilisations, et collectes de signatures pour une pétition inédite qui ont eu lieu dans 22 pays de l’Union Européenne. Fédérer autant de protestations sur un sujet aussi complexe que le traité transatlantique relève du tour de force. Mais la vivacité de l’engagement européen peut s’expliquer par la très forte méfiance des citoyens vis-à-vis de TAFTA : une consultation publique à l’initiative de la direction générale du commerce témoignait d’un avis négatif à plus de 97% des voix exprimée.

Les collectivités territoriales entrent dans la danse

« Le conseil régional d’Ile-de-France (…) demande l’arrêt des négociation sur le Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP), dit grand marché transatlantique (GMT), du fait de l’absence de contrôle démocratique et de débat public sur les négociations en cours ». La défiance symbolique du poumon économique français vis-à-vis du marché transatlantique témoigne d’un engagement allant bien au-delà du militantisme et de la sphère individuelle. Le mouvement qui enjoint les collectivités à se déclarer « zone hors TTIP » a été rejoins par près de 500 collectivités territoriales comprenant 54% de la population française.

La Commission européenne : entre mépris et surdité

Comment faire entendre cette contestation massive au sein même des bureaux feutrés de la commission européenne ? Une Initiative collective européenne, rassemblant les voix de plus d’un million d’Européens, comptabilisant au moins 7 pays membres, a été déposée auprès de la commission européenne. Quelle a été sa réaction à l’égard d’une si grande préoccupation des citoyens ? Rejeter l’initiative au motif que les négociations n’entraient pas dans le cadre juridique légal de l’Initiative Collective Européenne. Tout au plus, la Commission européenne a lancé quelques consultations publiques, tout en se gardant bien de conférer une quelconque valeur à ses contributions : « Ce n’est pas parce que soixante contributions proposent de se débarrasser du dispositif de règlement des différends entre États et entreprises que nous suivrons leurs recommandations »  a ainsi précisé le chef de cabinet du Commissaire au commerce.

Le mépris des institutions européennes n’a contribué qu’à renforcer le mouvement. Le 7 octobre 2015, ce n’est pas moins de 3,2 millions de signatures en faveur de l’arrêt des négociations qui ont été déposées dans les bureaux de Bruxelles. La Commission européenne pourra-t-elle s’opposer à la plus grande pétition européenne jamais enregistrée ?

Mathis Buis

Table-ronde : Le changement climatique et l’engagement citoyen

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Une implication individuelle et collective

Trois conférenciers exposent leurs convictions et leurs engagements afin de sensibiliser le public aux enjeux énergétiques, humains, et financiers induit par le dérèglement climatique.

La spécialiste du changement climatique, Chloé Maréchal-Chenevier, a ainsi fait preuve d’une grande capacité de synthèse et de pédagogie en présentant en quelques 15 minutes, les implications, les causes, et les dangers présents, imminents et futurs du réchauffement climatique. De la désynchronisation des écosystèmes à l’acidification des océans en passant par la modification du milieux de vie naturel des organismes vivants, la démonstration s’appliquait à mettre en lumière les impacts déjà observables du glissement climatique. Avec en conclusion, un appel à agir vite, puisque d’ors et déjà, l’engrenage climatique est lancé et aura des conséquences historiques sur les générations futures.

Sylvain Chirat, responsable de l’Agence Locale de l’Energie, spécialiste des questions de transition énergétique et des solutions locales, plaide lors de son intervention, pour un engagement citoyen accru. Plutôt que de remettre la faute sur la Chine, les multinationales, ou la frigidité des politiques, le citoyen doit réaliser et mettre en œuvre son potentiel écologique. L’objectif de l’Agence est notamment de dynamiser l’engagement citoyen. Elle propose de sensibiliser les citoyens sur les comportements sobres, les habitats durables et économes, ou encore de promouvoir les problématiques climatiques dans les politiques publiques locales. A travers son engagement dans le mouvement à succès Alternatiba, Sylvain Chirat promeut une lutte citoyenne contre le réchauffement climatique. Dans ses nombreux villages, Alternatiba expose des projets solidaires, des expositions sur la finance positive, ou encore des réflexions sur le bien-être.

La dernière intervenante, Hafidha Kadraoui, témoigne de son implication au sein de la vie associative, et dans la solidarité franco-tunisienne. Avec le soutien de la population locale et dans une démarche participative, la fondation agit notamment dans la promotion de l’échange inter-culturel, l’amélioration de la qualité de soins, et la diversification de l’agriculture. Il s’agit principalement d’impliquer la population dans la préservation de son patrimoine, et de proposer des solutions aux problématiques locales de développement : par exemple lutter contre la plastification de l’environnement, mais aussi réhabiliter des terres délaissées afin d’en faire des terres de rendements.

Chacun aujourd’hui à un rôle à jouer pour préserver l’environnement dans les bouleversements climatiques qui s’annoncent. L’avenir repose sur l’engagement individuel, collectif et sur l’inspiration que chacun pourra tirer des initiatives mondiales à succès à l’image des expériences de reforestations au Brésil et en Inde, ou encore de l’impact positif de monnaies locales et alternatives en Angleterre.

Mathis Buis

Conférence : les modèles économiques innovants pour lutter contre le changement climatique

5 projets pour développer le potentiel écologique des pays du sud

La seconde conférence de ce vendredi 13 novembre présente plusieurs projets durables à fort impact social, économique et environnemental. De la gestion des déchets à la problématique de l’habitat durable, en passant par l’incontournable énergie solaire, les différents intervenants s’appuient sur leurs expériences et leurs engagements pour exposer plusieurs mesures concrètes pour soutenir notre environnement dans les pays en voies de développement.

Le projet Africompost, porté par l’association Gevalor, propose d’intervenir dans la gestion et la valorisation des déchets au Cameroun, à Madagascar ou encore en Côte d’Ivoire. Face au désarroi des villes africaines face au défi d’une production croissante de déchets ménagers, l’association s’investit auprès des petits collectifs, et des collectivités locales, afin de réduire considérablement les émissions toxiques. Responsable de 5 % des gaz à effet de serre, dont du méthane nocif pour les populations, les déchets ménagers représentent un enjeu considérable. L’objectif du projet est d’assurer la réception, le traitement et la valorisation des déchets mais aussi la fertilisation des sols et la promotion d’une agriculture durable. En effet la récupération de la matière organique des déchets permet de produire un compost pouvant servir ultérieurement à la production agricole. En remplaçant les engrais chimiques subventionnés par l’Etat, le compost soutient une démarche de développement économique et durable auprès des petits agriculteurs.

Gauthier Ricordeau, nous propose, aux côtés des Agronomes et Vétérinaires Sans Frontière, de voyager au Togo où un élan national en faveur de l’agro-écologie est entrain de naître. Dans un contexte de forte dégradation des sols, l’objectif est de réduire la vulnérabilité des familles rurales et d’assurer la durabilité et la diversification de leur production. Le projet vise à accompagner la transition des pratiques agricoles intensives et chimiques vers une agro-écologie durable. Des formateurs, inspirés des pratiques locales, et des champs expérimentaux exposent et diffusent ces pratiques et savoirs qui conservent les sols et optimisent les productions. Une campagne de sensibilisation sur le rôle des arbres dans la culture, l’érosion des sols et les moyens de l’éviter a ainsi été mise en place. Aujourd’hui la technique du cordon pierreux permet aux paysans de réduire l’apport en eau et de retenir la terre de leurs cultures.

A Haïti, Entrepreneur du Monde, et son responsable en programmes énergies Thomas Thivillion, s’investie afin de assurer une meilleur qualité de vie aux familles pauvres touchées par l’érosion des sols et la déforestation. Le cœur du projet PALMIS Eneji est de promouvoir l’efficacité énergique au sein de foyer dépendants de sources polluantes et nocives. Il s’agit notamment de remplacer les équipements polluants par des produits durables comme des réchauds à faible consommation d’énergie, ou encore des lampes solaires qui tendent à assurer jusqu’à 5h d’éclairage par jours pour les près de 20 000 familles concernées par le programme.

L’énergie solaire, présentée par Anis Jouini, chef de département de l’institut national de l’énergie solaire, est une technologie rentable et propre vouée à un avenir lumineux. Captée notamment par la Chine, la marché du solaire commence à attirer les convoitises de nombreux pays. Les installations photovoltaïque ont un potentiel si important qu’elles tendrons à assurer jusqu’à 16 % de l’énergie mondiale en 2050, contre seulement 2 % aujourd’hui. Des habitats – 20 millions équipés en Californie – aux camions en passant par les routes, ces installations pourraient couvrir de nombreux équipements et de large pans du territoire. A titre d’exemple, si le quart des routes de France étaient couvertes par une fine couche de panneaux solaires, la récolte énergétique permettrait de subvenir aux besoins du pays.

La crise énergique a mis en lumière la problématique des modes d’habitats. La construction d’habitat est l’un des secteurs les plus impactant au monde, notamment en terme d’utilisation de ressources non renouvelables. La valorisation de matériaux écologiques largement oublié par les architectes, comme la terre, est donc un enjeu essentiel pour l’avenir. C’est ce que nous propose Philippe Garnier, responsable du Programme Habitat de l’association Krater. L’objectif est à la fois d’assurer des habitats résistants face aux aléas du changement climatique – séismes, ouragan – mais aussi de réduire les conséquences écologique des habitats. A Mayotte, ce sont près de 20 000 constructions durables qui ont été construites. Ce projet a permis de créer des emplois et d’impliquer de nombreux architectes et artisans locaux. En privilégiant les circuits courts et en s’investissant positivement dans l’économie local, l’initiative a convaincu les partenaires locaux et reçu un fort soutient politique.

Finalement, l’ensemble de ces projets tendent à dessiner les contours de modèles économiques et agricoles viables, tirant parti de savoirs faire anciens ou récents, mais aussi de polluants au potentiel sous-estimé. Les retombées en terme de progrès économiques et sociaux sont considérables et renforcent la crédibilité des voies alternatives aux modes de productions capitalistes.

Mathis Buis

Nous avons encore battu notre record d’émission de gaz à effet de serre

L’Organisation Météorologique Mondiale a annoncé aujourd’hui que les quantités de gaz à effet de serre viennent d’atteindre un nouveau record. Poursuivant leur inexorable croissance nourrissant le changement climatique et rendant la terre toujours plus inhospitalière pour les générations futures.

« Chaque année, nous signalons un nouveau record d’émission de gaz à effet de serre », affirmait le secrétaire général de l’OMS Michel Jarraud, lors d’un communiqué de presse. « Chaque année, nous répétons que nous sommes à court de temps. Nous devons agir immédiatement et réduire drastiquement nos émissions de gaz à effet de serre si nous souhaitons conserver une chance de contrôler la montée des températures mondiales ».

Le Greenhouse Gas Bulletin que l’OMM, publié en amont de la COP21 de décembre, à Paris, note une augmentation de 36% des particules responsables de l’effet de serre, entre 1990 et 2014.

Le rapport souligne également le lien qu’entretiennent les fortes concentrations de CO2 et la vapeur d’eau, elle-même responsable de l’effet de serre terrestre, bien que limitée dans le temps. En effet, un air plus chaud est plus humide, ainsi, une température de surface plus élevée induite par de fortes concentrations de CO2 causerait une augmentation de l’évaporation de l’eau en surface, accélérant ainsi l’effet de serre, et donc le réchauffement.  Ainsi, l’OMM souligne qu’une augmentation des concentrations de CO2 mènera à une augmentation disproportionnée d’énergie thermique et de réchauffement due à la vapeur d’eau.

D’ailleurs, le rapport indique que les concentrations atmosphériques de CO2 ont dépassé la barre symbolique de 400 ppm (part par millions). « Nous vivrons bientôt avec la réalité permanente d’un taux de CO2 supérieur à 400 ppm », indique M. Jarraud. « Nous ne pouvons voir le CO2, c’est une menace invisible, mais bien réelle. Une forte concentration de CO2 se traduit par des températures globales plus élevées, des évènements climatiques extrêmes comme des canicules et des inondations, la fonte des glaces, l’augmentation du niveau des océans, et l’augmentation de leur acidité. C’est déjà en train de se produire et nous nous dirigeons vers l’inconnu a une vitesse effrayante ».

Il a rappelé que le dioxyde de carbone reste présent dans l’atmosphère pendant des centaines d’années et plus encore dans les océans. « Les émissions passées, présentes et futures auront une incidence cumulative sur le réchauffement climatique et l’acidité des océans. Les lois de la physique ne sont pas négociables » prévient M. Jarraud.

Le rapport de l’OMM traite des concentrations atmosphériques et non pas des émissions des gaz à effet de serre. Les émissions représentent ce qui va dans l’atmosphère alors que les concentrations représentent ce qui reste prisonnier dans l’atmosphère, la biosphère et les océans. D’après l’OMM, environ un quart des émissions est absorbé par les océans et un autre quart par la biosphère, réduisant ainsi la quantité qui s’échappe dans l’atmosphère.

Cet article est nourri par le UN News Centre.

Lina Kim (The Typewriter

Traduction: Omar Tarabay

Conférences : Changement climatique, des idées concrètes pour notre planète

Révolutionner nos pratiques pour préserver notre santé et celle de notre planète. 

De 10h30 à 12h15, Yekbun Gürgoz, consultante pour la Coalition pour le Climat et l’Air Pur, Jacqueline Collard, de l’association Santé et Environnement en Rhône-Alpes (SERA), Mathieu Ruillet, Groupe Énergies Renouvelables Environnement et Solidarités (GERES) nous parlent de la manière dont nous pouvons, et devons, changer nos pratiques afin d’endiguer la destruction de notre écosystème.

Chaque année, la pollution de l’air fait 7 millions de morts. Les émissions de particules fines à l’origine de ces décès figurent également parmi les principales contributrices au changement climatique. En matière de climat et de santé, les pays du Nord et les pays du Sud sont interdépendants, mais collectivement, ils peuvent réduire la pollution de l’air.

Quelles pratiques et technologies pour préserver notre environnement ?

Trois organisations engagées pour préserver notre santé et notre écosystème

Ce matin avait lieu la première table ronde de la Semaine de la Solidarité Internationale, sur le thème des technologies écologiques et des pratiques innovantes contribuant à préserver notre santé tout comme notre environnement.

Le but de la conférence est de diffuser un message encourageant en présentant des mesures concrètes visant à lutter contre les émissions de polluants.

L’ONG Groupe Energie Environnement et Solidarité, présentée par Mathieu Ruillet, entreprend ainsi d’assurer une transition écologique dans des pays en voies de développement. En remplaçant progressivement les instruments domestiques de cuissons traditionnels, il s’agit d’inciter les foyers à se tourner vers des pratiques à faibles émissions de gaz toxiques. L’enjeux est notamment de protéger les populations exposées aux combustions de bois et de charbon, productrices de particules nocives. Ces pratiques dangereuses concernent la moitié de la population en Asie et près de 4,3 millions de morts prématurées dans le monde. Il s’agit aussi de respecter les filières économiques locales engagées dans la production et la distribution des combustibles ou des foyers polluants, en leur permettant de préserver leur activité tout en promouvant des pratiques plus propres. Reste la problématique du coût : au Cambodge, le foyer à gaz équivaut à 20$, tandis qu’un cuiseur Mong s’obtient pour 1,50$, et est donc bien plus accessible pour la population locale. Les résultats de l’ONG sont cependant remarquables : économies monétaires, moindre combustion de bois, progrès sociaux… C’est l’une de plus grandes réussites en terme d’impact, de durabilité, et de population concernée.

Yekbun Gurgoz s’est engagée au sein de la Coalition pour le climat et l’air pur et dans le cadre des programmes pour le développement de l’ONU, à réduire considérablement les polluants dits de courtes durées. Moins connus que le CO2, mais tout aussi nocifs pour la santé humaine, l’agriculture, et le climat, ces polluants proviennent des systèmes de cuissons, du chauffage, ou encore des frigidaires. Les polluants à courtes durées sont responsables impactent considérablement la santé, l’agriculture et le climat. Plusieurs mesures soutenues par la coalition pourraient pourtant permettre de réduire considérablement les émissions de carbones noirs et de méthanes (jusqu’à 40 % 2015) et éviter jusqu’à 2 millions de morts prématurées : meilleur traitement des eaux usées, remplacement du chauffage au bois et au charbon, réduire les incinérations…

La présidente de l’association SERA – Santé Environnement Rhône-Alpes – Jacqueline Collard, propose de revenir sur les tenants du confort occidental et leurs conséquences locales et globales en terme de déforestation, de sécheresse, ou encore de pollution des eaux et de l’air. C’est une donnée évidente et pourtant importante à rappeler : la masse des polluants produite par les foyers et les industries est présente et parfois visible dans l’air de Lyon. La région Rhône-Alpes est l’une des plus polluées de France, et ne répond aucunement aux recommandations de l’OMS. Or, la diffusion des particules fines en ville, responsable de la mort de 2 millions de personnes dans le monde, est particulièrement nocive pour la croissance des enfants, ou encore des bébés dans les poussettes, plus bas et donc plus exposés que les adultes aux émissions de gaz. Il s’agit donc de repenser de manière globale les modes des transports, les pratiques industrielles et agricoles… mais aussi au sein des foyers les modes de chauffages et l’utilisation des produits d’entretien. La loi sur la transition énergétique propose plusieurs innovations permettant une amélioration de la qualité de l’air : fonds pour le solaire, aides pour responsabiliser les pratiques, primes sur les bonnes pratiques…

En conclusion, il est notable que les populations du sud, souvent concernées par les bouleversements climatiques, soient de manière globale extrêmement propre comparées aux pratiques occidentales : le continent africain n’est ainsi responsable que de 2 % des émissions de CO2. Leurs efforts sont considérables, à nous de nous montrer à la hauteur !

Mathis Buis

L’action humanitaire et la souveraineté nationale

L’homme est un pompier pyromane. Cette métaphore illustre bien la dégradation de l’environnement que l’on fait subir à notre planète. La majorité des crises humanitaires trouvent leurs origines dans les activités humaines et parfois même, dans l’inaction de ces derniers. L’action humanitaire vise en premier lieu à sauver la vie et la dignité des êtres humains. En effet, une notion d’urgence imprègne l’idée de l’action humanitaire. Cependant, celles-ci doivent également envisager des opérations de préventions, sans lesquelles une catastrophe se produirait.

L’action humanitaire, et plus particulièrement les hommes qui en font la promotion et assure sa réalisation, jouit d’un statut social particulier, au même titre que les guérisseurs ou les enseignants. Cette aura leur permet d’accéder à un espace fermé à l’action politique nationale et internationale, sujette à suspicions et souvent à l’origine même des problèmes qu’elle prétend règler. L’action intrusive, quand bien même elle est une aide nécessaire et bienvenue, reste en opposition avec la logique du système international actuelle encore anarchique et stato-centré. Certes les États coopèrent, mais ils restent jaloux de leurs souverainetés, soucieux de leur survie, et à chacun à son échelle, attentifs à l’accroissement de leur pouvoir. Ainsi, l’action humanitaire peut être perçue soit comme une violation, soit comme un aveu de faiblesse des États. C’est une vision réaliste, mais encore d’actualité, qui ne doit cependant pas servir de seule base d’analyse.

Malgré le prestige, l’universalité de l’action humanitaire et l’intégration du principe d‘aide dans la majorité des religions et cultures mondiales, il n’est jamais aisé de faire de l’humanitaire. L’investissement gouvernemental, notamment des pays occidentaux, dans le champ humanitaire brouille en effet les séparations entre politique subjective et intéressée, et l’humanitaire plus objectif, universaliste, et désintéressé. L’humanitaire se doit d’apporter une aide inconditionnée à ceux qui en ont besoin, sans jugements de valeur que l’on peut porter à l’égard de ces derniers. D’un point de vue pragmatique, blâmer un acteur peut se montrer contre-productif du point de vue de l’aide sur le terrain. Se mettre à dos un gouvernement ou un groupe rebelle en l’accusant ouvertement pourrait porter préjudice à des populations en besoins, car l’on se trouverait défendu ou dans l’impossibilité sécuritaire de les aider. Fort heureusement, le Droit International Humanitaire se construit sur cette notion. Une notion qui peut cependant attirer des critiques aux acteurs de l’humanitaire.

Cette nécessité explique les positions très complexes que doivent entretenir les acteurs de la solidarité et de l’humanitaire, avec certains groupes ou États peu scrupuleux. Ils se trouvent entre une nécessité d’aide, de résoudre les problèmes tout en traitant avec les sources de ceux-ci. Une contradiction qui ne doit pas servir d’argument dégradant les actions humanitaires et leurs acteurs. En effet, la loi de la nécessité et sa prééminence sur la défense de nos valeurs subjectives (de Droits de l’Homme par exemple) doit rester la norme de l’action humanitaire.

Omar Tarabay